Peu est connu sur Julie Pinel et nous n’avons pas ses dates de naissance ni de mort. Elle est claveciniste, sans doute chanteuse. Il est possible qu’elle soit membre d’une dynastie réputée de luthistes dont l’un d’entre eux, François Pinel, était ordinaire de la Chambre du roi. Dans la dédicace de sa seule publication, elle précise qu’elle-même et sa famille sont au service du prince de Soubise « depuis plus de cinquante-cinq ans ». Julie est donc issue d’une famille de musiciens et exerce au sein d’un cercle privé aristocratique. Le prince Charles de Soubise (1715-1787), militaire et ministre, est un proche de Louis XV et de la marquise de Pompadour. Mélomane et mécène, il a à son service des musiciens et des musiciennes dont fait partie Julie Pinel. Il est donc naturel qu’elle lui dédicace son seul opus, semblant suggérer que le prince est favorable à ses activités de compositrice. Elle y mentionne un futur « livre de cantates », jamais paru, du moins sous sa forme imprimée. De même, Boisgelou note dans son catalogue (vers 1800), que Julie avait composé un opéra, lui aussi non publié ; il ajoute : « vraisemblablement il ne méritait pas de l’être », une réaction misogyne montrant bien le difficile accès des femmes à la composition lyrique. Le recueil que laisse Julie Pinel, Nouveau recueil d’airs sérieux et à boire (Paris, 1737), comporte des pièces au style varié : brunettes, airs à boire, airs sérieux, ariettes, une scène pastorale et une cantatille. Cette dernière, « Le Printemps », se remarque par son style expressif dans les récitatifs et italianisant dans les airs. On trouve également une « Scène pastorale », remarquable par ses séquences de récitatif dramatique dignes d’un opéra. Mentionnons enfin un air à boire pour basse-taille, « De la philosophie », qui se présente comme un récitatif orné, à la riche écriture harmonique. Il est sûr que ce recueil, par sa qualité et sa variété de tons, est à exploiter par des interprètes qui voudraient replacer Julie Pinel aux côtés de Clérambault ou Rameau.

– Bertrand Porot, Professeur émérite, Université de Reims-CERHIC et IReMus –


Active vers 1720-1737.